La condamnation* de l’ancien animateur préféré des Français a impacté le réseau immobilier portant son nom et l’activité de nombreux franchisés. Un cas d’école qui pose plusieurs questions, notamment celle de la dépendance trop forte d’une marque à une personnalité connue.
La responsabilité collective : une particularité de la franchise qui a ses avantages mais aussi ses inconvénients. Notamment quand certains comportements individuels, qu’ils viennent du franchiseur, d’un franchisé ou d’un partenaire, viennent enrayer la vie, l’organisation et la réputation d’une enseigne. « L’affaire Plaza en est l’exemple même, elle a mis en lumière un certain nombre de points sensibles auxquels il faut faire attention en présence d’un réseau éponyme » constate François-Xavier Awatar, avocat associé chez CMS Francis Lefebvre.
Le risque des marques patronymiques
Feuillette, Alain Afflelou, Yves Rocher, Jean-Louis David… Plusieurs réseaux de franchise portent en effet le nom de leur fondateur. Pour les franchisés, rejoindre une enseigne dont l’image repose sur un nom ou une personne présente certes des avantages : cela leur permet de profiter de la notoriété du fondateur, notamment s’il est médiatisé ou influent. Les premières années, les franchisés Plaza ont largement tiré avantage de la popularité de l’animateur star de M6. Idem pour ceux du réseau Afflelou, à l’époque où Alain Afflelou incarnait les campagnes de publicité de l’entreprise.
« En cas de dérapage ou de scandale, le patronyme peut cependant devenir encombrant et dangereux pour les franchisés en activité » alerte François-Xavier Awatar qui précise que ces cas sont relativement rares. Perte de confiance des clients, valeurs mises à l’épreuve, ventes affectées, magasins désertés… un scandale ou un procès ont vite fait de nuire à la réputation de marque. Dans le cas Plaza, plusieurs agences auraient ainsi enregistré des baisses de chiffres d’affaires importantes, certaines étant même la cible de dégradations matérielles.
L’absence de recours des franchisés en cas d’atteinte à la réputation de la marque
Quand la personne même du franchiseur et son image sont entachées, les franchisés ont peu de recours. « Juridiquement parlant, en cas de pépins, la marque reste valide, elle n’est pas déclarée nulle. Un affaiblissement de la marque n’est pas un motif valable pour résilier un contrat de franchise » prévient Olivier Mignot de Franchise Management. C’est là toute la limite de l’exercice car si certains franchisés Plaza ont connu des baisses d’activité, d’autres ont maintenu des niveaux de chiffre d’affaires satisfaisants, rappelant que le réseau ne se limite pas à une marque mais intègre aussi un savoir-faire qui continue de fonctionner. Difficile dès lors de quitter le réseau et de rompre le contrat quand d’autres continuent à performer.
« Généralement, les contrats de franchise ne contiennent pas de clause autorisant la résiliation immédiate en cas d’atteinte à la réputation de l’une ou l’autre des parties » décrypte François-Xavier Awatar. En revanche, il arrive souvent qu’une clause permettant au franchiseur de changer de nom soit inclue. Un point à vérifier car un changement de nom, élément clé du contrat de franchise, peut être lourd de conséquences. Il suppose des investissements élevés et surtout l’assentiment des franchisés.
Face à la colère de plusieurs franchisés, M6, actionnaire majoritaire de Stéphane Plaza Immobilier (SPI), et la direction de l’enseigne envisageaient initialement de faire évoluer le nom des agences. S’il était d’abord question de mettre deux «l» et/ou deux «z» à Plaza, le président du groupe Gilles Charon a finalement annoncé jeudi 17 avril dans les colonnes du Figaro la création d’une nouvelle marque, “Sixième Avenue” qui doit être lancée début mai 2025. Les franchisés qui le souhaiteront pourront donc rebaptiser leur point de vente sous cette nouvelle enseigne, ce qui n’impliquera pas une augmentation de leur redevance assure-t-il.
Intégrer un réseau dont le nom est rattaché à une personne connue suppose donc d’être conscient des bons côtés mais aussi extrêmement vigilant sur la capacité de l’enseigne à résister à un scandale et à poursuivre son assistance aux franchisés. L’histoire le montre : une dépendance trop forte d’un réseau à une célébrité n’est jamais sans conséquence. Il faut s’engager en connaissance de cause, pour le meilleur comme pour le pire.
Un développement trop rapide
Avec plus de 700 agences lancées en dix ans (il y en aurait aujourd’hui 600), le réseau Stéphane Plaza Immobilier a profité de la notoriété de l’animateur pour se développer et attirer en masse des candidats à la franchise. Y a-t-il eu un défaut de sur-vente ? Des recrutements trop rapides ou hasardeux ont-ils permis d’assoir ce développement effréné ? « Nous disons toujours qu’un réseau qui se développe trop vite se met en danger. L’enseigne Plaza faisait exception » ajoute Olivier Mignot qui pointe la folie des grandeurs de certains franchiseurs, notamment quand ils sont connus. En 2019, lors d’une interview accordée à L’Express, Stéphane Plaza avait déclaré : « Je sais que tout peut s’arrêter du jour au lendemain. Mais la marque sera installée… ». Il y a du vrai. « Malgré cet incident, une grande partie des clients semblent rester insensibles. Sur le marché de l’immobilier, le bien est plus important que le nom de celui qui le vend » conclut François-Xavier Awatar.
*Stéphane Plaza a été condamné pour violences conjugales le 18 février. Il a fait appel.
Crédit photo : Anna KURTH / AFP
Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : L’affaire Plaza, les leçons à retenir pour les franchises.
Les risques des marques patronymiques : Les réseaux de franchise basés sur le nom d’un fondateur, comme Stéphane Plaza Immobilier, bénéficient de la notoriété du créateur. Cependant, un scandale ou un dérapage de cette personnalité peut gravement affecter la réputation de l’enseigne et impacter l’activité des franchisés.
La responsabilité collective dans la franchise : La franchise repose sur la solidarité entre le franchiseur et les franchisés. Lorsqu’un scandale touche la marque, cela peut perturber l’ensemble du réseau, même si certains franchisés continuent à performer.
Les limitations des recours juridiques des franchisés : Les franchisés n’ont pas de recours direct en cas d’atteinte à la réputation de la marque. Les contrats de franchise ne permettent pas la résiliation immédiate, même en cas de dommages à l’image. La situation est compliquée si l’affaire touche le nom du franchiseur.
Le danger d’un développement trop rapide : Le réseau Stéphane Plaza Immobilier a connu une croissance explosive avec plus de 700 agences en dix ans. Ce développement rapide, parfois mal encadré, a généré des risques, notamment un recrutement précipité de franchisés qui ont parfois été confrontés à des difficultés de gestion.
L’importance de la solidité d’une marque au-delà de la célébrité : La dépendance à une célébrité pour développer un réseau peut être risquée. Si l’image de cette célébrité est entachée, la franchise doit démontrer sa résilience. Les franchisés doivent être conscients de ces risques avant de rejoindre une enseigne liée à une personnalité médiatique.