Le podcast “En Toute Franchise” explore le monde de la franchise à travers les expériences d’entrepreneurs ou d’experts. Dans cet épisode animé par Christophe Artous, Cécile Peskine, avocat associé au sein du cabinet Linkéa décrypte les enjeux majeurs d’une reprise, les erreurs à éviter et partage les clés pour réussir cette opération souvent complexe.
Entre conseils pratiques et retours d’expérience, elle nous guide pas à pas dans les coulisses d’un exercice aussi délicat que prometteur pour les entrepreneurs du monde de la franchise.
[Podcast – résumé IA vérifié par la rédaction]
Les enjeux et spécificités d’une reprise de réseau de franchise
Reprendre un réseau de franchise attire de plus en plus d’acteurs dans un contexte économique chahuté. Opportunités de consolidation, adossement à une marque existante, reprises à la barre des tribunaux dans certains secteurs (notamment le prêt-à-porter), ou encore arrivée de fonds d’investissement spécialisés: les scénarios se multiplient. Cette dynamique, visible chez de nombreux professionnels du droit et du chiffre, s’explique par la volonté de mutualiser les forces, d’accélérer le développement sans repartir de zéro et de profiter de positions concurrentielles déjà établies.
Reprendre un réseau de franchise n’a toutefois rien à voir avec l’acquisition d’un périmètre de succursales. Dans le second cas, l’acheteur devient propriétaire des établissements, des baux, des contrats de travail et des engagements bancaires: il maîtrise l’opérationnel et l’investissement. Dans le premier, il acquiert surtout un ensemble contractuel et relationnel avec des franchisés juridiquement indépendants. La valorisation s’en trouve plus délicate: là où des méthodes standards existent pour des actifs « en dur », l’évaluation d’un réseau franchisé repose sur une négociation de gré à gré, éclairée par l’audit de la marque, de la santé des franchisés, de la solidité des contrats, de la durée restante des engagements et de la qualité réelle des process.
Audit, transition et accompagnement : les clés d’une opération réussie
L’audit préalable est le pivot d’une reprise réussie. Au-delà de la liste des franchisés, des contrats de franchise et des documents d’information précontractuelle, il faut examiner la « contenance » du savoir-faire : manuel opératoire, durée et traçabilité des formations, preuves de l’accompagnement délivré. Un écart entre le contrat (ambitieux) et la pratique (allégée) accroît le risque de contentieux. L’analyse de la balance âgée permet d’identifier retards de paiement et fragilités éventuelles. Un audit de propriété intellectuelle s’impose pour sécuriser marques, noms de domaine et actifs digitaux. Dans cette phase, le recours à des spécialistes des réseaux est recommandé : mieux vaut ajuster le prix et les garanties en connaissance de cause que découvrir après coup des faiblesses structurelles.
La dimension humaine pèse tout autant que la technique. Juridiquement, les contrats de franchise prévoient généralement la possibilité d’un rachat du franchiseur sans opposition des franchisés. Dans les faits, l’attachement à un fondateur peut rendre la transition sensible. Anticiper un dispositif d’accompagnement — parfois via la présence du fondateur pour une période limitée — et organiser un plan d’« embarquement » sont essentiels. Cela suppose de rencontrer les franchisés individuellement, d’expliquer la stratégie, de rassurer sur la continuité des services et d’identifier les évolutions souhaitables du concept. Consacrer 6 à 12 mois à ce travail de terrain est souvent un investissement décisif.
Les retours d’expérience convergent : une reprise échoue fréquemment lorsque le repreneur sous-estime l’audit (réseau vidé de sa substance, départs en chaîne, contentieux) et néglige l’onboarding des franchisés. À l’inverse, les opérations réussies combinent un audit pointu, un calendrier de transition réaliste et, lorsque c’est pertinent, un accompagnement du cédant sur 12 à 24 mois, assorti d’incentives liés à la stabilité du réseau. Écouter sans dévoyer le rôle décisionnel du franchiseur, sécuriser les actifs immatériels et la relation contractuelle, puis déployer patiemment une feuille de route lisible : autant de clés qui transforment une opportunité de rachat en véritable levier de développement.












