Négoce en matériaux de construction, parfumeries et instituts, centres de radiologies : qu’apporte le fait de créer son entreprise sous enseigne dans ces trois secteurs, que ce soit en termes de facilités offertes par les services communs mis à disposition, de possibilités de participer à la vie du réseau ou encore de formation ?
Circuit court, mais pas pour autant plus rapide pour convaincre sans contraindre
Après une carrière riche, au départ internationale (Italie, Pérou, Turquie…) chez un industriel réputé, Fabio Rinaldi est devenu président directoire de Big Mat France. L’enseigne de négociants indépendants en matériaux de construction compte aujourd’hui environ 300 points de vente sur le territoire national et 850 en Europe.
S’il manage les salariés permanents de l’enseigne, il travaille également en collaboration avec le conseil de surveillance du groupement, constitué de douze membres élus par les adhérents, notamment pour partager la stratégie et son déploiement opérationnel au sein du groupement.
« Les adhérents participent activement à la vie de l’enseigne, à travers divers groupes de travail : finances, ressources humaines, communication, système d’information, etc. Nos équipes préparent et pilotent les dossiers, coconstruits et déployés avec les adhérents.
Devoir travailler avec des chefs d’entreprise me donne finalement davantage de leviers pour mettre en place une stratégie que dans un grand groupe, où il faut composer avec l’ensemble de l’organisation. Le circuit de décision est très court, mais pas pour autant toujours plus rapide à mettre en œuvre : il faut convaincre sans contraindre.
Quand je suis arrivé chez Big Mat, le groupement, après 35 ans d’existence, avait besoin de se moderniser. Malgré une belle marque, une présence à l’international en Europe et la fidélité de 90 adhérents.
Une nouvelle dynamique a été impulsée, avec la création de services, tels que le Marketing et la Communication, et l’enrichissement d’autres services, comme les Ressources Humaines et l’accompagnement financier. Je suis aussi allé à la rencontre d’adhérents, certains en étaient à la 5e génération, pour connaître leur métier et leurs attentes, et les impliquer pour construire ensemble, selon notre base line : « l’humain, aussi, ça compte ». Nos adhérents sont indépendants – au niveau capitalistique, de leur organisation interne – et interdépendants, en mutualisant les achats, la communication, la marque employeur, entre autres », témoigne Fabio Rinaldi.
Big Mat : une Académie des Bâtisseurs sur des sujets concernant tout chef d’entreprise
Au sein de Big Mat, l’adhérent donne en moyenne 1 à 2 journées par mois, pour la vie de l’enseigne et les échanges avec ses confrères. « Cela évite la solitude du dirigeant, en gagnant du temps et de la productivité par rapport à un chef d’entreprise « isolé ». Exemple : nous gérons 300 fournisseurs pour l’ensemble des adhérents, alors que seul, il devrait en rencontrer au moins 50 à 70, sans pouvoir mutualiser et profiter d’un effet volume sur ses achats.
Chaque adhérent peut connaître toutes les conditions de vente avec chaque fournisseur sur un portail interne. Il bénéficie aussi d’un salon annuel d’achat, depuis 20 ans, qui demande six mois de préparation. Il peut également se former dans notre Académie des Bâtisseurs sur des sujets concernant tout chef d’entreprise, au même titre que ses collaborateurs mais toujours adapté à notre activité : relance des devis, maintien des marges… Il bénéficie de la puissance d’une enseigne au service d’un ancrage local fort », relève Fabio Rinaldi. Toute candidature peut être notamment déposée sur le site Internet de Big Mat.
« Le responsable développement démarche et rencontre des négociants indépendants déjà installés ou candidats entrepreneurs. Il leur explique les services de Big Mat et l’intérêt de la mutualisation des moyens au sein d’une coopérative. Parmi les qualités requises, il faut avoir envie de partager son temps et son expérience avec d’autres chefs d’entreprise.
Dans notre réseau, grâce à ses permanents, la centrale possède la capacité de servir aussi bien l’adhérent mono-dépôt que multi-dépôt – réalisant de 1 à 140 millions d’euros de chiffre d’affaires -, la philosophie de la coopérative étant respectée – 1 adhérent = 1 voix – quel que soit le nombre de points de vente. En nous rejoignant, il sera consulté et décisionnaire, détiendra son avenir entre ses mains. À commencer par la participation à des commissions, pour apporter son expertise, qui sera déployée par les équipes de l’enseigne », précise Fabio Rinaldi.
Passion Beauté : un site marchand qui a pu être considéré comme un concurrent au départ… au final, fort utile pour tous !
Depuis 15 ans, Passion Beauté est un réseau composé d’une centaine de parfumeries et instituts, avec des adhérents possédant 1 à 17 points de vente chacun. Son directeur général, Jean-François Morinaux, a quant à lui, dès son arrivée, davantage tourné la tête de réseau et les équipes du siège vers les associés. Il a lancé des projets structurants, comme la refonte du concept de vente ou le déploiement d’un programme de fidélité national.
« Nous travaillons selon un projet à 3 ans, un plan défini par le conseil d’administration et le comité de direction. Les associés sont sollicités pour leurs idées, et valident les choix en assemblée générale, qui sont alors intégrés aux règlements et statuts de la coopérative, contrairement au système de franchise, où ils sont inamovibles. Ce processus possède un vrai avantage : il n’existe qu’un « contrat » unique, évolutif, dont les droits et les obligations sont applicables à tous les associés.
Depuis 2019, nous nous attachons à transformer la coopérative pour la rendre toujours plus agile, plus innovante et l’adapter aux nouveaux modes de communication et aux attentes des consommatrices en termes d’expérience client. Nous offrons désormais une expérience omnicanale via notre site marchand, qui a pu être considéré comme un concurrent au départ, mais qui a permis de déployer les services e-réservation de produits en magasin et dans nos instituts ou de générer du drive durant le confinement. Parallèlement, nous nous sommes attachés à conquérir des influenceuses », explique Jean-François Morinaux.
Un associé peut occuper différentes fonctions pour s’épanouir au sein de la coopérative Passion Beauté. « Dans les commissions ou en tant qu’administrateur par exemple, ce qui le fait sortir de son point de vente. Cela lui donne une autre dimension professionnelle, puisqu’il a aussi comme devoir de convaincre ses pairs du bien-fondé des décisions opérationnelles et/ou stratégiques qu’il prend avec ses collègues pour l’ensemble des associés, et qui doivent correspondre à leurs attentes et être adaptables en magasin. Il faut aimer le bénévolat. Par exemple, la fonction de président du conseil d’administration occupe 50 % de son temps disponible », souligne Jean-François Morinaux.
Tout animateur « vit la vie » des associés
Lors de son intégration, tout futur chef d’entreprise du réseau est audité. « En matière de recrutement, nous avons peu de créations, mais bien davantage d’opérations de reprises de points de vente, potentiellement orientés vers des salariés de notre enseigne, mais naturellement aussi vers des candidats entrepreneurs issus de toutes origines professionnelles.
Toute candidature est validée a minima par un administrateur et moi-même, après l’avoir audité. Y compris dans le cas d’un repreneur en interne. Tout dossier est présenté en conseil d’administration, qui peut le refuser ou demander des ajustements avant validation définitive. Le financement est facilité par nos banques partenaires, notamment la Socorec qui, en plus des prêts classiques, propose des prêts participatifs.
C’est ma maxime : l’adhérent est à la fois franchisé dans son point de vente et franchiseur, en tant qu’associé impliqué et engagé dans des fonctions, au siège de l’enseigne. Des associés qui s’auto-appliquent les décisions et qui ont le plaisir de les voir appliquées par leurs pairs.
Enfin, l’enseigne s’appuie, depuis 2016, sur 8 magasins en propre pour montrer l’efficacité de sa politique commerciale et des innovations proposées. Tout animateur du réseau gère au moins un magasin intégré et de ce fait, « vit la vie » des associés », précise Jean-François Morinaux.
Vidi : réseau créé pour répondre à trois défis du secteur de la radiologie
Praticien depuis près de quarante ans, le docteur Laurent Verzaux est aujourd’hui directeur général de Vidi, depuis 2017. Ce réseau pionnier dans la radiologie libérale française est une centrale d’achats et une coopérative portée par des médecins chefs d’entreprise. Il a été créé pour répondre à trois défis pour son secteur :
- Démographique : doublement des plus de 60 ans dans les dix ans et augmentation des maladies chroniques.
- Technologique : avec l’impact d’outils d’Intelligence Artificielle qui vont modifier la pratique des radiologues.
- Et économique : la part du Produit Intérieur Brut consacré à la santé n’étant pas extensible à l’infini.
« Vidi regroupe un quart des radiologues libéraux et emploie 3 500 salariés administratifs et paramédicaux, en leur proposant un catalogue de services, des achats de matériel – scanner, IRM, échographie – à tarifs négociés. Vidi facilite également le recrutement de talents et la prise de rendez-vous des patients, l’adhérent arbitrant toujours pour son centre de soins.
Notre coopérative offre de partager nos expériences, notamment en matière d’innovation, comme le développement de la radiologie interventionnelle, consistant en des gestes quasi-chirurgicaux. Exemple : mettre du ciment dans une vertèbre tassée, identifiée à travers un scanner, ou encore drainer un abcès mis en évidence par un examen », souligne Laurent Verzaux.
Objectif : rechercher des gains d’efficacité pour le maintien d’un système répondant au besoin de la population
Ces échanges au sein du réseau permettent ainsi de voir davantage de patients, en retravaillant leur parcours, de l’accueil à l’édition du compte-rendu. « Ou de réfléchir ensemble à la « sur-spécialisation » dans notre domaine, comme dans l’imagerie sportive ou la radio-pédiatrie.
Quelle que soit notre spécialité, nous, médecins devons tous nous remettre en question et nous donner les moyens de le faire, comme à travers une organisation nouvelle tel qu’un groupement. Juste un exemple lié à la baisse des moyens : si auparavant la secrétaire jouait un rôle d’assistante médicale, l’usage de plates-formes téléphoniques a dégradé la qualité du service.
Avec Vidi, nous améliorons notre efficacité dans le travail selon un modèle économique rentable, en visant une qualité de service pour le patient tout en restant proche de lui. Par exemple, pour qu’il ne se sente pas isolé en cas d’anomalie détectée sur un examen. Il faut revenir à des fondamentaux d’accompagnement du patient qui ont pu être oubliés, en raison d’un contexte complexe.
Le but n’est pas de transformer la médecine en bien de consommation, mais de rechercher des gains d’efficacité pour le maintien d’un système répondant au besoin de la population », souligne Laurent Verzaux. L’adhésion au sein de Vidi fonctionne aujourd’hui par cooptation.
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