On les avait repérées dans des séries américaines comme Les Simpson ou encore Sex and The City, les voilà qui débarquent en France ! Ce sont les fameux donuts signés Krispy Kreme. Cette franchise internationale made in US n’est pas la seule à déferler sur le marché français de la restauration pour se faire une place au soleil.
En février 2023, le spécialiste du poulet frit Popeyes inaugurait sont premier navire amiral sur le parvis de la gare du Nord à Paris. Wendy’s, le professionnel du burger est aussi attendu dans l’hexagone. Mais pourquoi et comment la street food américaine continue (encore et encore) à faire les yeux doux aux Français ? Explications.
Des marques étrangères aux mains de master franchisés
Pour attaquer le pays du jambon beurre et du croissant, les réseaux de franchise de restauration étrangers ont plusieurs solutions. Soit ils passent directement par des franchisés français, soit ils optent pour des masters franchisés, des entreprises en charge de développer le concept dans un autre pays.
Pour inonder la France de donuts, Krispy Kreme, une des marques du groupe JAB(à la tête aussi de Pret A Manger et Panera Bread) a créé une co-entreprise aux côtés du français Wagram Finances qui possède déjà Columbus Café & co mais aussi la marque canadienne Copper Branch. Et se développe donc via la master franchise.
Propriété depuis 2017 du groupe Restaurant Brands International, la marque Popeyes, a été confiée en 2019, en master franchise, au fonds d’investissement britannique TDR Capital (Buffalo Grill). Au départ incubé par Napaqaro, Popeyes Louisiana Chicken a repris son indépendance depuis le 1er juillet 2023.
Le top des recettes US avec un petit goût de France quand même
Si ces concepts étrangers débarquent dans l’hexagone, c’est évidemment pour imposer leurs produits signature. « Krispy Kreme est une « love brand » dans 40 pays. C’est la marque la plus aimée au monde dans le secteur de la confiserie. Même s’il n’y a pas encore de marché français pour les donuts, les consommateurs ont un vrai appétit pour la culture américaine », argumente d’emblée Alexandre Maizoué, CEO Krispy Kreme France.
Même son de cloche chez Popeyes qui revendique une cuisine de poulet mariné pendant 12 heures avant de fourrer la viande panée dans ses sandwichs. « J’attends de voir, je souhaite qu’ils réussissent mais les Français ne mangent pas du tout de la même façon que les Américains. Le matin, on ne débarque pas au bureau avec une boîte de 12 donuts, mais plutôt des croissants. Contrairement aux Américains, nous sommes attachés à des heures de repas plus ou moins fixes. Et peu de grignotage à toute heure de la journée », souligne Bernard Boutboul, président de Gira, un cabinet d’études de conseil et d’accompagnement spécialisé dans la restauration hors domicile.
Alors les réseaux de franchise étrangers, sans se renier, font quelques compromis pour les beaux yeux des Gaulois. Krispy Kreme propose, par exemple, des donuts avec des fruits et un peu allégés en sucre. Popeyes a mis à sa carte un sandwich au poulet agrémenté de cantal AOP. Ils sourcent leurs produits de manière locale. Les poulets Popeyes sont français. Côté aménagement de restaurant, on retrouve une certaine « french touch ». « On a recréé un univers assez parisien avec des banquettes brasserie, des tables bistros et des verres Duralex, comme à la cantine », illustre Alexandre Maizoué (Krispy Kreme). Popeyes mise sur un décor chaleureux dans les tons orangés avec un service à table.
Une communication XXL pour faire le buzz (et faire exister la marque)
Pour s’imposer au pays de la gastronomie qui n’a de cesse de se « premiumiser » avec des produits de qualité et des néo chefs engagés en faveur du bien manger, les réseaux de franchise étrangers n’ont d’autres choix que de lancer des campagnes de communication fracassantes. Ainsi, quelques semaines avant son installation au centre commercial Westfield Forum des Halles, Krispy Kreme, avec les trublions de l’agence de com’ Buzzman, a lancé une campagne détonante.
Ses affiches humoristiques vantant ses célèbres pâtisseries, avec des slogans tels que « Macaron démission » et « Le meilleur croissant de Paris », ont suscité de nombreux partages sur les réseaux sociaux. Mais aussi le courroux de la mairie de Paris qui a pointé du doigt un affichage sauvage et des amendes à la clé.
Qu’importe, l’important est de faire parler. Quelques semaines avant l’ouverture de son pilote des Halles, la marque a distribué gratuitement quelque 100 000 donuts aux Parisiens, organisé des jeux concours, inondé les rédactions de boîte dûment sucrées, etc. Bilan, le jour de l’ouverture, 400 personnes faisaient la queue à 7h59 devant la boutique pour ne pas rater une miette de ce lancement en fanfare.
Un développement pas à pas de ces enseignes étrangères
Évidemment, ces franchises internationales arrivent avec un objectif : inonder le marché français. Mais pas n’importe comment quand même. Krispy Kreme qui s’apprête à ouvrir une unité de fabrication à Créteil (Val-de-Marne) vise plus de 500 points d’accès à 5 ans. « Notre distribution sera pluri et omnicanal. Dans des lieux expérientiels bien sûr mais aussi le métro, les gares, des centres commerciaux, des armoires en GMS… », explique le dirigeant de Krispy Kreme en France.
Aux Etats-Unis, un test concluant a été réalisé dans neuf McDonald’s dans le Kentucky. En attendant sa généralisation, 180 McDonald’s vont retirer leur offre sucrée au profit des donuts si cher à Homer Simpson. Pour le développement en franchise, Alexandre Maizoué, se laisse le temps. « Dans 2 ans, une fois le concept éprouvé, les implantations en succursales réussies, pour cranter, nous devons aujourd’hui nous concentrer sur notre bateau amiral », insiste-t-il.
Chez Popeyes, le développement en franchise attendra également 2025. L’enseigne qui compte aujourd’hui douze points de vente dont quatre dark kitchen, et huit restaurants en centre-ville, centre commercial, stand alone, drive… veut d’abord éprouver tous les formats avant de les dupliquer dans l’hexagone. Il faut dire que la première tentative de lancement de cette enseigne sur le marché français en 2018 avait tourné court. « La marque n’avait pas trouvé d’écho en France à l’époque car l’enseigne n’était pas structurée pour accompagner les franchisés à l’étranger. Le concept et la carte n’étaient pas adaptés à ce marché. Et les prix trop élevés par rapport à la moyenne du secteur », explique Olivier Rego, le PDG de Popeyes France.
Pour éviter un nouveau faux pas, ce pro du poulet frit à la mode cajun travaille encore sur des améliorations opérationnelles, notamment dans le sourcing des produits et les négociations tarifaires. Epaulé par un cabinet, il débute le repérage de futurs franchisés. « Pour le lancement en franchise, nous recherchons d’abord des profils ayant une expérience dans la restauration rapide car notre objectif est de co-construire l’expérience ensemble. A 9 ans, nous visons 300 restaurants dont la moitié en franchise, l’autre moitié en succursales », conclut-il.
Crédit photo : Jérémy Bouchet