Référencer sa franchise

Dire non : le geste invisible des vrais leaders

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Une jeune femme la main tendue avec écrit Stop dessus.

Le leader est souvent perçu comme un facilitateur, un médiateur, un moteur d’adhésion. Dans la culture managériale actuelle, on accorde de la valeur au “oui”, on encourage l’écoute, on applaudit la flexibilité. Cependant, derrière le concept de consentement permanent, un mot court mais puissant résonne : non. 


Dire non ne signifie pas refuser le dialogue. Au contraire, il peut parfois être l’acte le plus ouvert qu’un leader puisse poser. C’est un moyen de choisir, de préserver, d’affirmer. Plutôt qu’un geste autoritaire, dire non peut être considéré comme un acte subtil de discernement et d’intelligence collective.

J’ai exploré le sujet avec Éric Fratty, SVP Design & Construction chez LVMH Hospitality Excellence. Un échange de qualité avec un leader pleinement animé par le sens du courage dans les prises de décisions. 

Un dirigeant ne refuse jamais sans raison : il dit non pour maintenir le cap, pour préserver un niveau d’exigence, pour affirmer une ambition. Il dit non pour créer les conditions d’un vrai “oui”, bien fondé et aligné. J’ai observé de nombreuses organisations perdre leur identité en acceptant tout : des projets qui divisent, des talents qui ne partagent plus les valeurs fondamentales, des clients dont les demandes prennent le pas sur les besoins réels.

En disant oui à tout, elles finissent par renoncer à ce qui les caractérisait. Dans des secteurs comme le luxe, l’hôtellerie, la restauration, où chaque détail compte, la promesse ne peut pas être négociée. Elle doit être honorée, respectée, incarnée. Parfois, tenir une promesse commence par refuser ce qui semble plus simple, plus rapide, plus consensuel. Éric Fratty incarne cette attitude avec humilité : « On m’a proposé à plusieurs reprises le poste que j’occupe aujourd’hui. J’ai refusé plusieurs fois. Parce que je n’étais pas prêt. Si j’avais accepté trop tôt, je me serais égaré. » Ce refus n’est pas un abandon, mais un choix stratégique, preuve de maturité. C’est la conscience que chaque “oui” précipité, faible ou vague peut nous éloigner de notre légitimité.

À tous les niveaux de l’entreprise, il est difficile de poser des limites sans se sentir coupable. On évite de dire non de peur de frustrer, de brider la créativité, de bloquer les initiatives. On privilégie le fluide, l’agile, le “positif”. Dans ce contexte de consentement permanent, le non devient presque révolutionnaire… Le non est la contrepartie du contrat. C’est ce qui lui confère sa valeur. Ce n’est pas un rejet de la relation, mais une façon de dire à l’autre : « Je te respecte, mais je trace une ligne car c’est notre fondation commune. »

Pour un franchiseur, cette ligne représente l’ADN de l’entreprise. Ce que vous êtes prêt à défendre, même dans les moments difficiles. Selon Éric Fratty, « L’entreprise, en plus de sa fonction éducative, a une dimension sociale. Elle crée des repères. » Le non est l’un de ces repères. Il pousse à réfléchir, à s’adapter, à comprendre le sens derrière les règles. Il ne brise pas le lien, mais le structure. Il ouvre la voie à un dialogue adulte.

L’élégance du refus

C’est dans la maturité que se trouve le vrai leadership. Non pas dans la recherche de la popularité, mais dans la capacité à rester fidèle à ses valeurs, à son cap, à sa parole. Éric Fratty souligne qu’il faut « une certaine maturité pour accepter un non. On peut l’exprimer avec douceur, mais il faut l’assumer. Le non a des conséquences » ajoute-t-il. Et ce refus doit être calme, argumenté, contextualisé et sans brutalité.

Dans mon expérience en tant qu’experte en leadership, j’ai accompagné de nombreux dirigeants dans cette transition. Ce ne sont pas les décisions consensuelles qui rallient, mais les décisions claires qui révèlent une posture, créent un sentiment d’équité et favorisent la confiance, même en cas de désaccord. 

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La relation au non se complexifie avec l’arrivée des nouvelles générations. La Génération Z a grandi dans un monde où tout est personnalisable, ajustable. Si dans ce contexte fluide, le non pouvait être perçu comme violent, il est désormais l’un des principaux leviers éducatifs du management intergénérationnel. Non pas pour imposer, mais pour promouvoir la coexistence dans un cadre commun. Non pas pour entraver l’expression, mais pour instaurer une forme de responsabilité. Éric Fratty souligne avec clairvoyance, « Les nouvelles générations ont une relation complexe avec le NON. Le rôle de la société est de les acclimater à un environnement qui ne vise pas nécessairement à les protéger. » L’entreprise, sans devenir un lieu de contrainte, peut redevenir un lieu de développement individuel en réhabilitant la valeur du refus comme un espace d’exigence partagée. Là où le “oui” procure satisfaction, le “non” favorise l’efficacité.

Entreprises : quels refus êtes-vous prêts à assumer ?

C’est une question que je pose régulièrement lors de séminaires stratégiques, de coaching d’équipe ou d’accompagnement de transformation : Quels sont les aspects non négociables pour votre entreprise ? Souvent, les regards se croisent, les hésitations se font sentir. On cherche, car après avoir accepté tant de choses, on en oublie ce que l’on souhaite protéger. Une entreprise qui ne sait plus dire non est une entreprise qui a perdu son identité. C’est peut-être le défi de notre époque : réapprendre à établir des limites claires, même si elles ne font pas consensus. Non pas pour retrouver un pouvoir vertical dépassé, mais pour forger un leadership cohérent, incarné, exigeant et en fin de compte efficace. Le “non” en tant qu’acte d’engagement collectif .

Dans un monde saturé d’images, de sollicitations et d’urgences, le leader capable de refuser construit la clarté. Il privilégie la justesse à la popularité, la solidité à la séduction, les repères car il croit encore en un sens collectif. Il dit à ses franchisés : « Je ne te dis pas non pour te contredire. Je te dis non pour nous réunir, ensemble ». Cette posture rappelle celle de Cyrano de Bergerac, refusant de plaire à tout prix mais inspirant par son intégrité : “Déplaire est mon plaisir. J’aime qu’on me croie incapable de plier.” C’est cette posture que nous devons adopter aujourd’hui. Une posture droite, responsable, claire. Une posture qui dit non pour mieux dire oui quand c’est nécessaire.

Parce que le non ne s’improvise pas, voici cinq leviers concrets à activer :

  1. Clarifiez vos objectifs, votre socle, vos lignes rouges non négociables. Un non n’a de sens que s’il est en accord avec une vision, une ligne directrice claire. C’est cette base qui vous permet de trancher sans vous trahir.
  2. Préparez vos décisions comme des engagements, non comme des arbitrages. Dire non, ce n’est pas simplement refuser. C’est décider d’agir différemment. Faites de votre non une orientation, pas une punition.
  3. Osez la transparence. Expliquez pourquoi vous dites non. Même si cela nécessite du temps, même si c’est inconfortable. La clarté dans l’explication est essentielle pour un refus élégant.
  4. Pratiquez le non progressif. Un non peut être posé de manière progressive. Ecoutez, reformulez, coconstruisez… avant de poser la limite. Le non doit être solide mais pas brutal. 
  5. Appuyez-vous sur le collectif. Dans les réseaux, les franchises, les équipes, vous n’êtes jamais seul à promouvoir l’exigence. Le non devient légitime s’il est en accord avec un cap partagé.
AI Summary

NOTRE RÉSUMÉ EN

5 points clés

PAR L'EXPRESS CONNECT IA

(VÉRIFIÉ PAR NOTRE RÉDACTION)

Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet : Dire non, le geste invisible des vrais leaders.

  • Le non, un acte de discernement

    Dire non n’est pas une attitude autoritaire, mais un choix stratégique. Un leader choisit de dire non pour préserver la qualité, affirmer ses valeurs et maintenir son cap, en particulier dans des secteurs exigeants comme le luxe et l’hôtellerie.

  • Le non, un repère dans l’entreprise

    Dans une entreprise, savoir dire non est essentiel pour maintenir une identité forte. Le refus clarifie ce qui est non négociable et structure les relations en créant un cadre commun de valeurs et d’objectifs.

  • La maturité du leader dans l’art du refus

    Le véritable leadership ne réside pas dans la recherche de la popularité, mais dans la capacité à refuser de manière calme et argumentée. Dire non avec élégance renforce la confiance et la cohérence au sein de l’équipe.

  • La gestion du non avec la Génération Z

    La relation au refus est complexe avec les jeunes générations, habituées à un environnement flexible et ajustable. Le non devient un levier pour instaurer une responsabilité partagée et un cadre respecté, sans devenir contraignant.

  • Comment cultiver le courage de dire non

    Pour dire non de manière efficace, il est important de clarifier ses objectifs, d’agir avec transparence, d’adopter une approche progressive et de s’appuyer sur le collectif. Un non bien posé devient un acte d’engagement partagé et d’exigence collective.

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