[Parole d’expert] Activer l’ascenseur social en franchise : mode d’emploi en quatre actes par Sylvain Bartolomeu, président dirigeant associé de Franchise Management et François Simoneschi, journaliste.
Prendre conscience que la franchise est une belle alternative
Imaginée comme un mode de partage de valeurs, la franchise s’avère une voie alternative à la réussite vécue à travers les systèmes conventionnels. Elle convient parfaitement à des franchiseurs qui ne sont pas issus de grandes écoles de commerce, à des franchisés qui ne sont pas d’anciens cadres en reconversion et à des salariés de la tête de réseau ou de points de vente, même peu ou pas diplômés, qui rêvent de devenir chefs d’entreprise.
En effet, à des personnes maîtrisant un concept dans sa pratique quotidienne, elle offre de placer leur énergie, au service des métiers d’entrepreneur, comme le management ou la vente. Ces profils de franchisés offrent un vrai gain de temps en formation pour l’enseigne, ainsi qu’un risque d’échec considérablement réduit.
Il faut savoir que les meilleurs pourvoyeurs de franchisés de ses vingt dernières années sont de grandes entreprises qui formaient bien leurs collaborateurs… sans proposer la création d’entreprise en franchise au sein de leur réseau ! Et qu’aujourd’hui, un jeune sur deux possède l’ambition de devenir chef d’entreprise.
Les sites de recrutements de candidats doivent d’ailleurs travailler sur la démocratisation de l’accès à la franchise, ne pas exclusivement centrer leur attention sur les cadres, mais montrer que la franchise reste une voie parallèle pour bien des profils.
Maîtriser les deux clés pour activer l’ascenseur social
Deux facteurs de réussite s’imposent pour monter dans l’ascenseur social de la franchise. D’une part, la motivation. En s’investissant pleinement dans leurs missions, ces profils montrent de l’endurance et du courage. D’autre part, la résilience, c’est-à-dire la capacité à rebondir. Elle est également l’une des qualités essentielles d’un chef d’entreprise, pour recycler ses doutes et angoisses, ainsi que résister aux coups durs.
Le profil adéquat peut accéder au métier de franchisé en complétant ses aptitudes avec les apports de la franchise : un savoir-faire et un accompagnement permanent, pour le soutenir et contrôler l’application du concept.
Le rôle du franchiseur sera de savoir jauger son candidat à la franchise, à partir d’une réponse positive à deux questions fondamentales : A-t-il les yeux qui pétillent en imaginant cet avenir ? Serai-je capable de le cadrer et le gérer ?
Cela implique toutefois de disposer d’un savoir-faire exigeant, car pour des concepts moins matures, le fait de posséder une certaine expertise acquise durant sa vie professionnelle est alors impérativement nécessaire.
Une belle histoire parmi tant d’autres : entré comme livreur chez Pizza Cosy, Théo, titulaire d’un BTS en comptabilité et gestion, est devenu pizzaïolo, puis second d’une pizzeria, avant de prendre la gérance de la succursale de Bourgoin-Jallieu. Après plusieurs années à travailler pour l’enseigne, il est devenu franchisé à Aix-en-Provence l’an dernier. À seulement 25 ans.
Adapter le modèle économique aux profils intéressants
Pour favoriser l’émergence de tels profils, l’enseigne peut adapter son modèle économique de trois manières, en agençant ses conditions contractuelles et financières.
Tout d’abord, par la franchise participative. Dans ce cas, le franchiseur prend une part du capital de son franchisé de façon transitoire, sans lien de subordination avec lui. Il joue le rôle d’un investisseur « dormant », donc minoritaire, avec un rachat généralement échelonné dans le temps et un coût fixé dès le début. Il ne peut utiliser ce contrat pour contraindre ou réduire la marge de manœuvre de son franchisé.
Deuxième solution : en allégeant le concept en termes d’investissements initiaux. Moins d’apports sont imposés au départ, en contrepartie de davantage de charges d’exploitation dans le temps.
Enfin, la location-gérance : le franchiseur reste propriétaire du fonds de commerce et le loue à son franchisé, lequel l’exploite sous sa propre responsabilité et en son nom. Le locataire-gérant capitalise ainsi des revenus pour devenir franchisé du point de vente ou, si l’emplacement est trop cher à acquérir, pour s’implanter ailleurs sous la même enseigne.
Le franchiseur doit promouvoir son modèle d’ascenseur social au sein de son réseau. Et même, faire savoir que les futurs franchisés ou ceux déjà installés peuvent disposer des moyens d’ouvrir d’autres points de vente, ce qui constitue un vrai relai de croissance pour toute enseigne.
Un développeur du groupe Fournier est devenu multi-franchisé à 35 ans sur plusieurs concepts (Socoo’c, Mobalpa) après un déclic familial. Son parcours vers la franchise a été aménagé par le groupe, son expérience l’ayant aidé à trouver de beaux emplacements !
Monter une école de formation spécifique
Pour créer des vocations au sein de son réseau, le franchiseur doit faire de l’ascenseur social un axe stratégique de son développement, et conduire à l’évolution de sa culture d’entreprise.
Il peut ainsi monter une école de formation spécifique, souvent appelée Académie, menant du salariat à l’entrepreneuriat, voire un cursus pour passer de franchisé à multi-franchisé. Cette école peut aussi former à des métiers du concept, notamment ceux connaissant une pénurie de main d’œuvre, comme c’est le cas pour Attila avec les techniciens de toiture. Autre exemple : Vie & Véranda prête une attention particulière à l’ascenseur social, en ayant permis à des commerciaux de devenir animateur, développeur ou référent technique.
Un pour tous, et tous pour un !
En franchise, l’ascenseur social reste un formidable booster de développement. Si et seulement si l’ensemble des composantes du réseau souhaitent mettre en place une mécanique solide, voire en assurer le service après-vente, pour qu’il ne tombe pas en panne.
Cela impose que :
- Le franchiseur construise des modèles vertueux, avec un juste partage de la valeur, orientés pour faire réussir les franchisés et permettant aux meilleurs de capitaliser pour investir dans le réseau.
- Les franchisés acceptent que leurs meilleurs talents puissent devenir des chefs d’entreprise, qui seront des alliés au service de la marque sur le territoire.
- Le franchiseur et les franchisés se vouent une confiance et un respect mutuel.
Sinon, l’ascenseur social restera une belle idée… bloquée au rez-de-chaussée.