La transmission d’entreprise représente un enjeu économique national de premier plan, essentiel au maintien de l’emploi, à la pérennité des savoir-faire. Consciente de ces défis, Bpifrance renforce son accompagnement à destination des cédants et des repreneurs.
Explications avec Virginie Si Hassen, directrice des partenariats et du pilotage des plans stratégiques chez Bpifrance.
5questions à Virginie Si Hassen, directrice des partenariats et du pilotage des plans stratégiques chez Bpifrance


On parle souvent de la transmission comme d’une “bombe à retardement” silencieuse. Comment Bpifrance appréhende-t-elle ce sujet ?

Virginie Si Hassen : Plusieurs études soulignent un vieillissement progressif des dirigeants de PME et d’ETI. Paradoxalement, le nombre de transmissions observées est en recul, ce qui contribue à une perte de valeur économique et d’emplois sur nos territoires. Nous ne sommes pour autant pas alarmistes. Il convient de rappeler que ce sujet est pris en compte depuis plusieurs années par les pouvoirs publics et par Bpifrance. Pour accompagner efficacement ces transitions, il est désormais essentiel de mieux comprendre la communauté des cédants et des repreneurs.

Quels sont les principaux freins à la transmission aujourd’hui ?

Virginie Si Hassen : Malgré les enjeux, la préparation à la transmission reste insuffisante dans de nombreuses entreprises. Cela peut prendre un an ou trois ans et plus en fonction de la taille de l’entreprise. On observe souvent que plus la société est petite, plus le délai et le processus de transmission sont importants. Il faut organiser le transfert de compétences, mettre en place une gouvernance. Les raisons de l’échec d’une transmission sont aussi souvent financières, psychologiques et culturelles.
Certains dirigeants ne sont simplement pas prêts à céder leur société. D’autres, le plus souvent des chefs d’entreprise à la tête de sociétés de petite taille décident, à l’approche du départ à la retraite, de finaliser leur contrat, de clôturer leur créance et de fermer leur entreprise sans penser à la transmission. Un gros travail de sensibilisation doit être entrepris par les différentes parties prenantes, l’expert-comptable, le juriste, le fiscaliste pour accompagner les cédants dans la mise en avant de leur offre et renforcer l’accompagnement des repreneurs.
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Vous avez lancé récemment le Prêt croissance Transmission. Quels sont ses objectifs et à qui s’adresse-t-il ?

Virginie Si Hassen : Rares sont les porteurs de projet de reprise d’entreprise qui peuvent acquérir une entreprise grâce à leur apport personnel en fonds propres. Le financement reste un obstacle majeur à la transmission. C’est pour lever ce frein que Bpifrance a lancé le Prêt Croissance Transmission. C’est un prêt sans garantie qui permet de financer la reprise des PME et des ETI, qui ont un historique de trois ans d’activité, pour un montant maximum de financement de 5M€.
À la différence d’une offre bancaire classique, ce dispositif intègre un différé d’amortissement de deux ans. Une période pendant laquelle le repreneur ne rembourse pas le capital, ce qui lui offre une bouffée d’oxygène les deux premières années. Cet outil vient compléter le prêt transmission régional, éligible aux PME, qui s’appuie sur des ressources régionales, et le prêt d’honneur à taux zéro qui va permettre au porteur de projet de muscler son apport en capital.

Comment Bpifrance accompagne-t-elle les cédants ?

Virginie Si Hassen : À ce jour, 41 % des dirigeants de PME expriment leur intention de céder leur entreprise dans les cinq prochaines années. Cependant, un quart d’entre eux n’a pas encore défini de projet de transmission en raison d’un manque de temps ou de difficultés à identifier un repreneur. Pour y remédier, nous avons enrichi notre offre d’accompagnement des cédants dans la préparation de leur projet et la connexion avec des repreneurs via la Bourse de la Transmission.
Cette plateforme recense toutes les annonces de Fusacq, du CRA, des fédérations professionnelles, des chambres de commerce et d’artisanat et d’autres opérateurs privés, ce qui représente plus de 46 000 affaires. C’est un dispositif gratuit et méconnu des dirigeants. Nous proposons par ailleurs du partage d’expertise sur Bpifrance-Création.fr, des formations en ligne et des webinaires pour aider les vendeurs à structurer leur projet, à définir une stratégie. Des consultants peuvent par ailleurs intervenir une dizaine de jours pour les accompagner dans cette étape clé.

Que faudrait-il changer pour que la transmission d’entreprise devienne un réflexe et non plus une urgence mal préparée ?

Virginie Si Hassen : Le premier enjeu clé repose sur une meilleure préparation et sensibilisation des cédants. Il faut également valoriser l’intérêt stratégique de la reprise. Contrairement à une création ex nihilo, reprendre une entreprise permet de bénéficier immédiatement d’un marché existant, d’un portefeuille clients établi et d’une notoriété déjà construite. C’est un gain de temps considérable, mais aussi un levier de croissance plus sécurisé, à condition, bien sûr, que la transmission soit bien préparée, que les risques soient évalués.
NOTRE RÉSUMÉ EN
5 points clés de l'interview
PAR L'EXPRESS CONNECT IA
(VÉRIFIÉ PAR NOTRE RÉDACTION)
Voici un résumé en cinq points clés de l’interview : « Le financement reste un obstacle majeur à la transmission », Virginie Si Hassen Bpifrance
Un enjeu économique national
La transmission d’entreprise est cruciale pour préserver l’emploi et les savoir-faire. Pourtant, malgré le vieillissement des dirigeants de PME et d’ETI, le nombre de transmissions diminue, ce qui fragilise le tissu économique français.
Des freins multiples à la transmission
Le principal obstacle reste le manque de préparation. Les transmissions échouent souvent pour des raisons financières, psychologiques ou culturelles. De nombreux dirigeants préfèrent fermer leur société plutôt que de la céder, faute d’accompagnement adapté.
Le financement, obstacle majeur pour les repreneurs
Bpifrance a lancé le Prêt Croissance Transmission, un prêt sans garantie pouvant atteindre 5 millions d’euros, avec deux ans de différé d’amortissement. Ce dispositif vise à lever le frein du financement et à faciliter la reprise des PME et ETI.
Un accompagnement renforcé des cédants
Bpifrance soutient les dirigeants via la Bourse de la Transmission, une plateforme recensant plus de 46 000 affaires à reprendre. L’établissement public propose aussi des formations, webinaires et interventions de consultants pour structurer les projets de cession.
Faire de la transmission un réflexe
Pour Virginie Si Hassen, il faut valoriser la reprise comme une alternative stratégique à la création d’entreprise. Bien préparée, elle offre un gain de temps et un levier de croissance durable, à condition que les cédants et repreneurs soient mieux accompagnés.











