Référencer sa franchise

Les pratiques commerciales trompeuses dans les réseaux

Fanny Rou avocate associé spécialisée en droit de la franchise.

[Parole d’expert] Lorsqu’une tête de Réseau est confrontée à une fraude ou une tromperie commise par ses franchisés, que peut-elle juridiquement entreprendre ?


Notamment, la commission d’une pratique commerciale trompeuse par son franchisé à l’égard de ses propres clients, peut-elle justifier la rupture du contrat de franchise par le franchiseur à ses torts ? Réponses de Fanny Roy, avocate associée et spécialiste en droit de la franchise.

En l’espèce deux décisions rendues par les cours d’appel d’Aix-en-Provence et de Paris, dans deux types de réseaux totalement distincts (salles de sport, commerces de montres) illustrent la réaction de la tête de Réseau, ainsi que ses conséquences.

En premier lieu se pose la question de savoir si la violation par le franchisé d’une obligation légale à l’égard de tiers (ses clients), peut permettre aux franchiseur de rompre son contrat de franchise.

La réponse est positive pour les deux cours d’appel qui ont eu à se saisir de cette question.

Dans le cas  d’espèce soumis à la cour d’appel d’Aix-en-Provence

Le franchiseur tête de Réseau d’une salle de sport avait constaté les pratiques frauduleuses de deux franchisés visant à solliciter de la part de leurs clients, la remise de chèques de caution, non datés, afin de les encaisser en cas de résiliation anticipée des abonnements, ou visant à ne pas enregistrer les résiliations sollicitées par les clients. Ces constats étaient corroborés par divers témoignages de salariés et plaintes de clients. 

Les juges ont alors retenu que le franchiseur avait eu raison de mettre un terme au contrat de franchise aux torts des franchisés, ne pouvant laisser perdurer des pratiques frauduleuses dans son réseau ;  les juges ont toutefois considéré que le franchiseur aurait dû adresser une mise en demeure préalable à ses franchisés, en application de la clause résolutoire, ne tenant pas compte de l’argumentation du franchiseur indiquant qu’en cas de faute grave, une rupture immédiate du contrat de franchise pouvait être prononcée.

Les juges ont alors simplement repoussé la date de résiliation effective du contrat de franchise à un mois plus tard. Les franchisés ont été condamnés à verser au franchiseur, en application de la clause pénale, l’indemnité contractuelle prévue.

Dans l’affaire jugée par La Cour de Paris

Le concédant, qui avait donné une licence de marque pour la commercialisation de montres, a de même été conforté dans sa décision de mettre un terme de façon anticipée au contrat de licence. Le licencié avait proposé à la vente, sans son autorisation, les produits à un prix réduit de plus de 70 %.

La cour d’appel de Paris y voit une pratique trompeuse à l’égard du consommateur (en l’absence de prix de référence permettant de justifier cette réduction prétendue), mais aussi en tire une conséquence à l’égard du concédant. 

En effet, elle retient que si ces dispositions légales sont destinés à la protection du consommateur, elles sont invocables par le concédant, le manquement à une obligation légale de nature à jeter le discrédit sur des produits porteurs de sa marque, et, par association, sur son comportement à l’égard de la clientèle, pouvant caractériser une faute contractuelle, opposable au licencié. 

Le Licencié est débouté de sa demande visant à obtenir restitution des sommes versées au titre du contrat résilié, et est au contraire condamné à verser au concédant la pénalité contractuelle.

Ainsi, la violation par le franchisé de ses obligations légales à l’égard de ses clients peut justifier la résiliation du contrat par le franchiseur, à la condition toutefois, que ce dernier démontre que cette violation a eu un impact sur lui, en l’occurrence une atteinte à l’image du Réseau. Celle-ci pourra être démontrée grâce à des plaintes de clients, notamment.

Le franchiseur n’est donc pas désarmé juridiquement en cas de pratiques trompeuses commises par ses franchisés : il devra néanmoins s’assurer que la rupture du contrat  soit mise en œuvre correctement , en tenant compte de la clause résolutoire existante au contrat de franchise, et devra justifier que la pratique dénoncée lui causant un préjudice.

*CA AIX EN PROVENCE 2022/176 12 mai 2022
*CA PARIS 22/ 12581  2 octobre 2024


(vérifié par notre rédaction)

Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur le sujet des pratiques commerciales trompeuses dans les réseaux :

Rupture de contrat justifiée : Les pratiques commerciales trompeuses commises par un franchisé, telles que la fraude envers les clients, peuvent justifier la rupture du contrat de franchise par le franchiseur, si cela porte atteinte à l’image du réseau.

Exemples de jurisprudence : Deux décisions judiciaires, à Aix-en-Provence et à Paris, illustrent ces cas où la fraude, comme l’encaissement abusif de chèques ou la réduction de prix trompeuse, a conduit à la résiliation des contrats avec les franchisés.

Obligation de mise en demeure : Bien que la rupture soit justifiée, les juges ont rappelé l’importance d’une mise en demeure préalable, même en cas de faute grave, respectant ainsi les clauses résolutoires des contrats de franchise.

Impact sur l’image du réseau : Le franchiseur doit prouver que les pratiques trompeuses nuisent à la réputation et à l’intégrité de la marque, soutenant cela par des témoignages de salariés ou des plaintes de clients.

Conséquences pour le franchisé : Les franchisés fautifs peuvent se voir contraints de verser des indemnités pénales définies par le contrat, sans possibilité de récupérer les sommes versées lors de sa résiliation.

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