Les commerces de proximité disparaissent dans les zones rurales. Notamment les boulangeries qui baissent le rideau les unes après les autres. À Autruy-sur-Juine, la mairie a cependant trouvé la parade.
Plus de quatre ans sans boulangerie. À Autruy-sur-Juine, village du Loiret de 760 âmes, le dernier boulanger a plié bagage en 2020. « Nous avons mis en place un distributeur de pain pour répondre aux besoins de première nécessité des habitants mais les administrés voulaient plus. Ils me demandaient la ré-ouverture d’un vrai commerce » raconte Christophe Guerton, maire de cette petite commune rurale, située à 20 kilomètres d’Étampes, qui ne compte plus qu’un bar-tabac et un garage.
Son cas ne fait pas exception dans le paysage actuel. Selon la Direction générale des entreprises, seules 16,4 % des communes de moins de 1 000 habitants disposent d’une boulangerie.
Résultat, d’après un rapport d’information du Sénat*, les habitants doivent généralement parcourir plus de 2,2 kilomètres pour acheter du pain frais. « La boulangerie la plus proche se trouve à quatre kilomètres, ce qui n’était pas très pratique » poursuit le maire. Désireux de redonner vie à son village, il a pris le taureau par les cornes pour permettre à un entrepreneur souhaitant redynamiser le territoire d’ouvrir une boulangerie.
Un projet de boulangerie de proximité dans le Loiret subventionné à hauteur de 77 %
L’ancien local étant inadapté, le conseil municipal a décidé dès 2021 de faire construire un nouveau bâtiment. Un espace flambant neuf de 250 m2, avec atelier de production, réserve, chambre frigorifique, sanitaires, salle de réception et places de stationnement. Le projet, d’un coût total d’un million d’euros, a été subventionné à hauteur de 77 % par le département, la région et l’État.
Dans le cadre de politiques volontaristes, les pouvoirs publics aident volontiers les petites communes à revitaliser leurs commerces de proximité grâce notamment au Programme de Reconquête du commerce en milieu rural, lancé en 2023 et géré par l’ANCT (agence nationale de la cohésion des territoires). Doté d’une enveloppe de 36 millions d’euros, il offre des aides à l’investissement pouvant aller jusqu’à 80 000 euros pour accompagner l’acquisition de locaux ou de matériel professionnel, ou financer les frais de réaménagement d’un commerce multiservices.
Des activités complémentaires pour des fournées qui boostent le chiffre d’affaires
Restait cependant à trouver le candidat. Le maire n’a pas eu à le chercher bien loin. « Nous avons lancé un appel à projet et Anthony Beuchet, déjà boulanger à Étampes et Méréville, à quatre kilomètres de chez nous, s’est manifesté. Nous l’avons intégré et impliqué dans le projet dès le départ » indique Christophe Guerton. Après trois ans de travaux, la nouvelle boulangerie, « Le fournil d’autrefois », a ouvert le 3 janvier, au plus grand bonheur des Altraciens et Altraciennes.
Anthony Beuchet y a vu, de son côté, une belle opportunité de développement. « Il y a certes une prise de risque, j’ai investi 300 000 euros en équipements matériel, mais j’ai à cœur de rendre service aux habitants et de leur proposer une offre de qualité ».
Au-delà de vendre pains, viennoiseries et pâtisseries, l’artisan a créé une offre snacking avec des plats préparés, à emporter ou à consommer sur place, et un petit coin épicerie avec des produits de base (farine, sucre, oeufs…). « Ces activités complémentaires permettent d’augmenter le chiffre d’affaires, estimé à 280 000/300 000 euros. Pour une boulangerie de bourg, c’est acceptable. En moyenne je vends entre 300 et 350 pièces par jour » indique Anthony Beuchet, qui tourne avec un effectif de quatre personnes, dont une vendeuse originaire d’Autruy-sur-Juine. À 40 ans, c’est sa troisième affaire.
Une boulangerie ouverte, synonyme de lien social
Ce retour en grâce est applaudi par les habitants. « Les gens sont contents. La boulangerie est un lieu de rencontres, on peut y prendre un café, discuter. Cela recrée de l’animation et du lien social. Des personnes d’autres communes fréquentent le commerce, et cela permet aussi aux anciens de sortir de chez eux. Je suis convaincu que le commerce en milieu rural a sa place » revendique Christophe Guerton.
Quant à Anthony Beuchet, qui loue les locaux à la municipalité, il se dit « fier » de participer à la revitalisation du bourg avec ses produits, tous faits maison. « Il y a pas mal d’enseignes comme Marie Blachère, Ange ou l’Atelier Papilles installées pas loin, à Étampes. Pour un artisan comme moi, c’est un peu le pot de terre contre le pot de fer » ironise le boulanger qui se satisfait de voir des établissements comme le sien redonner envie aux gens de consommer local et rendre les petites villes plus attractives.
*Soutenir le commerce en milieu rural, mars 2022
Notre résumé en 5 points clés par L’Express Connect IA
(Vérifié par notre rédaction)
Voici un résumé en cinq points clés de l’article sur la disparition des boulangeries dans les zones rurales et la solution trouvée par la commune d’Autruy-sur-Juine :
Un désert commercial en milieu rural : Seuls 16,4 % des villages de moins de 1 000 habitants disposent encore d’une boulangerie. À Autruy-sur-Juine, dans le Loiret, les habitants ont dû vivre plus de quatre ans sans commerce de pain, illustrant une tendance nationale alarmante.
Un projet municipal ambitieux : Pour relancer l’activité, la commune a investi dans la construction d’un bâtiment de 250 m² entièrement dédié à une nouvelle boulangerie. Coût du projet : 1 million d’euros, financé à 77 % grâce aux aides de l’État, de la région et du département.
Soutien des pouvoirs publics : L’initiative s’inscrit dans le cadre du Programme de Reconquête du commerce en milieu rural (ANCT), qui finance jusqu’à 80 000 € pour la relance des commerces de proximité dans les zones rurales, avec un budget global de 36 millions d’euros.
Un entrepreneur local engagé : Anthony Beuchet, boulanger expérimenté, a saisi l’opportunité. Il a investi 300 000 € et développé une offre diversifiée (snacking, épicerie, plats préparés), permettant d’atteindre un chiffre d’affaires estimé à 280 000-300 000 € par an.
Un levier de lien social et d’attractivité : La réouverture de la boulangerie renforce le tissu social, attire des clients des communes voisines et redonne vie au village. L’exploitant comme la mairie soulignent l’importance du commerce local dans la revitalisation rurale.















