L’edito exclusif de Philippe Crevel : Libre échange, n’ayons pas peur

08 avril 2024Service aux entreprises

Les exportations représentent un tiers du PIB de la France et sont à l’origine de plus d’un quart des emplois. Pour autant, tout accord de libre échange est vécu, dans notre pays, comme une menace susceptible de générer des destructions d’emplois et des faillites d’entreprise.


Le rejet, par le Sénat, de l’accord commercial (CETA) avec le Canada illustre la tentation de plus en plus forte du protectionnisme. Avoir peur d’un pays peuplé de 38 millions d’habitants, situé à plus de 6 800 kilomètres, traduit un étonnant manque de confiance en soi. Il ne faut pas oublier que l’Union européenne, avec ses 450 millions d’habitants, est la première puissance commerciale mondiale. Ce fameux accord, appliqué de manière provisoire depuis 2017 ; s’avère bénéfique pour la France et, en particulier, pour son agriculture. En six ans, les exportations françaises vers ce pays ont, en effet, progressé de 33 %. L’excédent commercial s’est accru pour les boissons ainsi que pour les produits laitiers chimiques ou cosmétiques. Les importations d’énergie, de matériels de transports, de produits informatiques ou électroniques ont, de leur côté, augmenté. En revanche, l’accord n’a donné lieu à aucune importation de volaille et n’a pas abouti à l’augmentation de celles de viande bovine. Il ne faut pas, par ailleurs, négliger le fait que de nombreuses entreprises européennes – dont Airbus et Alstom – sont implantées au Canada contribuant aux échanges croisés entre les deux zones économiques. La remise en cause du libre-échange avec le Canada, un pays aux structures proches de celles de l’Europe, est, en soi, illogique.

Les échanges internationaux sont d’autant plus avantageux que les pays sont économiquement proches. Les opposants au libre-échange récusent la théorie économique des « avantages comparatifs » en vertu de laquelle les pays ont tout avantage à se spécialiser non pas dans les secteurs où ils sont les meilleurs mais dans ceux où ils sont les moins mauvais. Le commerce international obéit à une logique gagnant/gagnant. Un exportateur n’a pas vocation à porter préjudice à ses clients pour continuer de vendre. C’est pour cette raison qu’assimiler les échanges commerciaux à la guerre économique est une ineptie. Evidemment, un encadrement ou plutôt une régulation est nécessaire pour éviter les pratiques déloyales comme le dumping ou le recours à des subventions faussant la libre concurrence. Tout accord prévoit des procédures en cas de différends. Le commerce, ce n’est pas la jungle. Il y a des lois devant être respectés par l’ensemble des acteurs.

En ces temps troublés, les barrières tarifaires et non tarifaires ont tendance à se multiplier aux États-Unis, en Chine et en Europe. Ces barrières contribuent au ralentissement du commerce mondial et freinent la croissance. Dans l’histoire économique, les périodes de libre-échange se caractérisent toujours par une expansion rapide quand celles marquées par le protectionnisme riment avec stagnation ou dépression. L’instauration de droits de douanes ou de contingentements pénalise les consommateurs avec la hausse des prix sans protéger les salariés ou les entreprises. Elle ralentit les gains de productivité et la diffusion du progrès technique.

Aux États-Unis, dans les années 1970, les mesures prises contre les aciers japonais et européens afin de sauver des emplois dans la sidérurgie se sont avérées contreproductives. Elles ont provoqué le déclin de l’industrie automobile américaine, contrainte d’utiliser de l’acier plus cher et de moins bonne qualité. Toute sanction commerciale appelle, par ailleurs des mesures de rétorsion créant ainsi une spirale délétère aboutissant à l’autarcie. La France n’a rien à gagner à entrer dans un tel cycle. Elle y perdrait en compétitivité, en croissance et en emplois. Le choix du protectionnisme serait celui du renoncement et du déclin. Or, que ce soit au niveau de l’aéronautique, de la construction naval, de l’énergie, de l’agriculture, de la finance, du luxe ou de la pharmacie, la France possède de nombreux atouts reconnus au-delà de ses frontières !

D'autres actualités du réseau CrediPro

  • CrediPro

    L’édito de Philippe Crevel : l’avenir peut-il être mis...

    UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE MARQUÉ PAR LA PRUDENCE ET L'INCERTITUDE Dans le passé, de nombreuses crises sont survenues en octobre. Ce fut le cas en particulier des krachs boursiers de 1929 et de 1987. La « malédiction » du mois d’octobre est liée à la...

    04 septembre 2024 Service aux entreprises
  • CrediPro

    Des Jeux et du Pain

    La France connaîtra-t-elle, dans les prochains mois, une dépression post Jeux olympiques et para-olympiques comme ce fut le cas, dans le passé, pour les autres pays organisateurs? Si en amont et pendant les compétitions, les Jeux génèrent un...

    02 août 2024 Service aux entreprises
  • CrediPro

    L'edito de Philippe Crevel : quand la politique fait son...

    En 1981, avec la victoire à l’élection présidentielle de François Mitterrand, le marché « actions » français fut sans-dessus-dessous. Le lendemain de l’élection, le 11 mai, la bourse de Paris, logée alors au Palais-Brongniart, avait ouvert avec une...

    15 juillet 2024 Service aux entreprises

D'autres actualités du secteur Service aux entreprises

  • GCL Experts Gestion

    Les meilleures pratiques pour conseiller vos clients en...

    La gestion d’entreprise est une matière aussi large que complexe. Les dirigeants d’entreprise qui ont recours à un conseiller en gestion espèrent bénéficier d’une force de proposition. En tant que consultant indépendant dans le conseil aux...

    11 octobre 2024 Service aux entreprises
  • Mail Boxes Etc.

    Nouvelle ouverture à Strasbourg Nord

    📢 Avec plus de 100 centres répartis sur toute la France, le réseau Mail Boxes Etc. est heureux d’annoncer l’ouverture d’un nouveau Centre à Brumath dans le Bas-Rhin, près de Strasbourg. Ce projet est porté par Christian TOTOUOM. Le projet d’une vie...

    11 octobre 2024 Service aux entreprises
  • GCL Experts Gestion

    Comment calculer une TVA ?

    La TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée) est un impôt indirect payé par toute personne physique ou morale lorsqu’elle achète un bien ou service. Incluse dans le prix de vente du bien ou service, la TVA est donc collectée par le vendeur qui la reversera...

    30 septembre 2024 Service aux entreprises

C'est quoi L'Express Franchise ?

L’Express Franchise, c’est l’acteur incontournable de l’univers de la franchise. Bien plus qu’une plateforme de mise en relation entre franchiseurs et candidats à la franchise, L’Express Franchise est aussi un média. Articles, podcasts, vidéos et livres blancs, chaque jour, nous proposons des contenus inspirants. Notre ambition : répondre de manière éclairée à toutes les questions que peuvent un jour se poser de futurs franchisés. La franchise n’aura bientôt plus de secret pour vous !