Street-food et développement durable : une triple équation

4 août 2023
Categories : Photo de Keyvan Badri fondateur de la franchise street food Mersea.
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Directement concernées par les questions environnementales, certaines franchises de la restauration, et notamment de la street-food, jouent le jeu du développement durable. Mais qu’entend-on vraiment par durabilité dans la restauration ? Quels sont les enjeux spécifiques au franchises de street-food ? Comment les acteurs du secteur s’adaptent pour y répondre ?


Keyvan Badri, fondateur et dirigeant de l’enseigne Mersea, spécialiste de la street-food à base de poisson, répond à nos interrogations. Pour lui, proposer une cuisine à la fois gourmande et durable est avant tout une façon de donner du sens à son métier. Aujourd’hui, Mersea figure parmi les quelques rares marques de street-food labellisées Ecotable. Il nous donne sa définition de la durabilité et nous apporte sa vision des enjeux auxquels fait face le secteur de la street-food.

Restauration durable : de quoi parle-t-on ?

Dans le secteur de la restauration, il existe de nombreux leviers pour exercer son activité de la façon la plus durable possible. Le premier d’entre eux est de respecter la saisonnalité des produits travaillés. En effet, le simple fait de cuisiner des produits de saison permet notamment de les consommer à maturité, évitant ainsi une surexploitation de certaines espèces et autorisant leur renouvellement. « Dans le cadre de la pêche, par exemple, le fait de pêcher des poissons de taille adulte, à la bonne saison donc, permet aux espèces de se reproduire et de continuer de se développer. » explique Keyvan Badri.

Consommer durable, c’est donc parfois repenser les façons de cuisiner, réinventer des recettes pour y intégrer des ingrédients peut-être moins utilisés, parfois moins prestigieux, mais tout aussi bons et surtout bien plus respectueux du rythme naturel des espèces. « Si on prend l’exemple du saumon, qui est le poisson le plus consommé au monde, on est amené à produire plus de saumon d’élevage que ce qu’il ne faut, parce que les consommateurs en demandent. Il y a donc un déséquilibre, alors qu’il y a de la truite ou beaucoup d’autres poissons qui sont disponibles à chaque saison. » confirme le fondateur de Mersea.

Pour cuisiner durable il faut donc  pouvoir s’appuyer sur des fournisseurs responsables, capables de garantir une exploitation durable des ressources : élevage raisonné, pêche respectueuse des fonds marins, agriculture biologique, producteurs locaux, etc. Certains mettent en avant des écolabels qui assurent un certain niveau d’engagement en faveur du développement durable. 

Les enjeux du développement durable dans le secteur de la street-food

Si de nombreux restaurateurs souhaitent s’engager dans une démarche de développement durable, certains freins peuvent les ralentir dans leur exécution. Keyvan Badri en identifie trois principaux : la traçabilité, le prix et l’aspect commercial. 

En effet, sur le premier point, beaucoup de fournisseurs font l’effort de transparence et de traçabilité, mais pas tous. Il s’avère donc parfois difficile pour un restaurateur de connaître la provenance des produits qu’il achète, ou encore les conditions d’élevage, de récolte, ou de pêche. La deuxième problématique, c’est le sujet financier : on a tendance à croire que tout ce qui est durable ou bio est plus cher. Or, ce n’est pas nécessairement le cas. Ce sujet de rentabilité peut être notamment surmonté en adaptant les recettes aux produits de saison. Enfin, le troisième challenge relevé par Keyvan Badri est d’adresser tout cela de manière commerciale, en expliquant la démarche, sans être donneur de leçons.

Le secteur du street-food connaît quant à lui d’autres enjeux bien spécifiques au métier. En effet, qui dit street-food, dit accessibilité, gourmandise et volume. Les acteurs de ce marché doivent s’adapter à ces contraintes et résoudre une triple équation pour allier ces trois critères indispensables pour leur clientèle. « Il faut faire des choix justes. L’enjeu du développement durable, qui est encore plus vrai pour la street-food, c’est de s’adresser au plus grand nombre en termes de prix, de concept et de communication. » détaille Keyvan Badri. 

« Il y a encore beaucoup de gens que ça n’intéresse pas et qui viennent chez nous seulement pour manger. Donc, il faut intéresser ceux qui sont engagés sur ce sujet de la durabilité, sans dégoûter les simples gourmands. Le premier point de communication, c’est la gourmandise et seulement après vient celui de la durabilité. » Quoi qu’il en soit, c’est bien le rapport qualité/prix qui sera le juge de paix dans une démarche de développement durable. La condition sine qua non, est de conserver un prix raisonnable. « Si on ajoute des euros au prix final, pour une question de durabilité, on risque de se couper de ces 70-80 % de clients qui, au final, attachent moins d’importance à la question mais qui nous font vivre. » conclut Keyvan Badri.

L’exemple de Mersea : enseigne street-food et durable

Les fondateurs de Mersea ont toujours eu à cœur de proposer une cuisine respectueuse de l’environnement. Récemment labellisé Ecotable, l’enseigne a également signé la charte Ethic Océan, garantissant leur engagement pour une pêche durable. « Ma définition de la durabilité, c’est simplement le fait de préserver nos ressources d’aujourd’hui et de demain. Tout est une question d’équilibre dans la vie et en termes de durabilité, l’équilibre c’est de consommer ce que la nature nous offre. » conclut Keyvan Badri.

Ainsi, les restaurants Mersea bénéficient du savoir-faire du chef étoilé Olivier Bellin qui élabore pour eux des menus durables et propose des alternatives gourmandes aux espèces de poissons surexploitées, comme le saumon, qu’il remplace par de la truite ou même du lieu jaune. Les fondateurs ont également banni de leur carte l’avocat, souvent acheminé du Mexique, lui préférant des produits locaux et de saison, comme l’artichaut.

L’enseigne s’engage également à lutter contre le gaspillage alimentaire en utilisant toutes les parties des poissons qu’ils travaillent. La peau et les arêtes sont ainsi utilisées pour des fumets. Enfin, une attention toute particulière est portée à la gestion des déchets d’emballages. Si le client consomme sur place, il sera servi dans des assiettes réutilisables. Pour la vente à emporter, chaque produit est servi dans un emballage en papier kraft biodégradable accompagné de couverts eux aussi biodégradables. L’équation semble donc résolue avec succès chez Mersea. Chaque geste est pensé pour être le plus respectueux de l’environnement possible, sans jamais économiser sur la gourmandise des produits ni sur leur accessibilité.

Écrit par Sibylle Pinochet

Rédactrice en chef

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