Entièrement automatisés et sans personnel dans la boutique, les magasins connectés vont-ils un jour supplanter les épiceries et autres petits formats des grandes enseignes de la distribution ? Le magasin classique est-il mort ? Pas si sûr. Explications.
Et de deux ! Fort du succès de son premier magasin « sans contact » installé sur le campus de l’Edhec à Croix (Nord), Auchan France a ouvert en avril dernier Auchan Go le lab, sur le site de son siège social, à Villeneuve d’Ascq. Cette deuxième boutique intelligente est plus grande que la première (86 m2), les clients sont totalement autonomes. Ils s’identifient en téléchargeant l’application dédiée qui génère un QR code ou en plaçant directement leur carte bancaire sur le système d’entrée du magasin.
Une fois dans la boutique, ils font leur shopping. Grâce aux caméras à reconnaissance de mouvements et aux étagères équipées de balances, le panier virtuel se remplit automatiquement. À la sortie, le paiement est instantané sans aucune autre démarche à réaliser, et le ticket de caisse est digitalisé. Un magasin connecté en somme ! Est-ce l’avenir des commerces de proximité ?
Un commerce connecté qui cherche encore son modèle économique
« Le magasin connecté est une excellente idée d’ingénieurs et de techniciens, mais je ne crois pas que cela soit l’avenir du commerce de proximité. Il y a un vrai problème de modèle économique. La technologie coûte très cher et le panier moyen y est souvent faible. Amazon Grocery a même fait un peu machine arrière en remettant des vendeurs aux caisses de ses magasins connectés », constate Jean-Marc Megnin, directeur général Altavia Shoppermind.
Monoprix en a fait l’amère expérience et a dû se résoudre à fermer ses Black Box. « Le vrai sujet c’est l’approvisionnement de ces points de vente. On ne peut pas envoyer des camions parcourir 50 km pour recharger une box. Ce n’est économiquement pas viable », précise-t-on au sein de l’enseigne tout en ajoutant ne pas avoir abandonné l’idée de trouver un système de magasin connecté rentable. Mais pas de visibilité ni sur la date de mise en service, ni sur le nom, bien sûr.
Des box connectées dans le monde rural
Pendant que les grands distributeurs travaillent, de plus petits acteurs investissent ce marché de niche. Parmi eux, Api, né dans la tête de deux Charentais, Alex Grammatico et Julien Nau, a déjà déployé 10 mobile homes connectés en Poitou-Charentes. « Il s’agit pour nous de lutter contre la désertification du monde rural, qui manque cruellement de commerces et de services de proximité », explique Marie-Laure Basset, PDG d’Api.
Pour s’implanter, l’enseigne vise les communes d’au moins 750 habitants sans épicerie, situées à environ 10 minutes d’un supermarché. « Tout part d’une volonté des municipalités de redynamiser leur territoire. Il nous faut juste un terrain plat de 150 m2 et un raccordement électrique. Ensuite, nous arrivons avec le mobile home complètement équipé. Nous avons passé un partenariat avec Carrefour pour alimenter nos magasins et nous proposons 700 produits à prix supermarché. Proposer une offre large et au bon prix est le nerf de la guerre », ajoute-t-elle.
Ouvertes 7j/7, 24h/24 grâce à un système d’accès via un QR code, ces supérettes enregistrent des pics de fréquentation les week-ends et jours fériés. Sans vouloir dévoiler de chiffres, API se dit content du montant du panier moyen et du trafic journalier.
Des box autonomes pour l’heure développées en propre
L’enseigne vise 40 supérettes de village connectées d’ici fin 2023, et 140 un an plus tard. Pour l’heure, le réseau est déployé en propre. Chaque « Apicien » approvisionne 5 magasins selon un système de grappe territoriale afin d’optimiser les coûts logistiques. « Nous nous développons pour l’heure en propre afin d’éprouver notre concept et de mettre au point des supports de formation dédiés. En 2025, nous passerons peut-être à la franchise pour accélérer notre déploiement », précise Marie-Laure Basset.
« En ruralité, les habitudes s’urbanisent grâce au développement des outils digitaux. Ce qui peut fonctionner sur ces territoires, ce sont les box connectées qui pallient la désertification rurale et qui proposent une gamme de produits en circuits courts. Des yaourts, des fromages, des légumes de producteurs locaux. Mais c’est quand même dommage de ne pas mettre de l’humain dans nos campagnes », regrette Jean-Marc Megnin, DG Altavia Shoppermind.
Boxy, autre acteur de supérettes connectées, mais cette fois dans des containers maritimes reconditionnés, a fait le choix de s’implanter en zones urbaines et périurbaines. D’abord en Ile-de-France, puis en région Rhône-Alpes et Hauts-de-France. Et vise 1 000 magasins en 2025. La guerre des box serait-elle déclarée ?