L’opération de transmission, complexe aussi bien techniquement qu’humainement, commence par des diagnostics sur l’entreprise (financier, commercial, juridique, etc).
Il faut notamment concilier les enjeux du cédant et du repreneur, ce qui nécessite d’adopter un certain comportement de part et d’autre, pour réussir la vente et parvenir à la signature de l’acte.
La valeur de l’entreprise ne fait pas son prix
Coté cédant, toute reprise d’entreprise débute par un diagnostic « à chaud » de l’affaire, en s’appuyant sur un expert-comptable.
« Il faut déjà réaliser un diagnostic financier de façon objective, par rapport aux ratios de la profession mais aussi à la commercialité de la zone, et notamment de sa concurrence active ou passive. Puis un diagnostic humain, pour estimer le savoir-faire détenu par l’équipe et déterminer le personnel clé à fidéliser.
Le diagnostic juridique est essentiel, notamment concernant le bail commercial, afin de déterminer s’il est nécessaire de le compléter, voire de le réviser. L’outil de travail doit être en bon état, car il déteste bien souvent le changement d’utilisateur, générateur de pannes. Enfin, la rémunération du dirigeant doit être en adéquation avec son rôle et le travail fourni au sein de l’entreprise : manager, producteur… ou simple investisseur.
Comme dans le cas d’un bien dans l’immobilier, la valeur de l’entreprise fait l’objet d’une discussion, qui amène à son prix de vente. », insiste Olga Romulus, membre du collège des experts de la fédération française de la franchise.
Faire jouer l’ascenseur social
Transmettre une entreprise à des collaborateurs devient une pratique à laquelle les franchises s’intéressent de plus en plus.
« Permettre à des managers de qualités d’accéder à l’entrepreneuriat, offre de faire jouer l’ascenseur social au sein des enseignes. Ce qui manque alors souvent, ce sont les capitaux. La location-gérance, avec une possibilité de rachat, peut alors être un moyen de devenir chef d’entreprise pour ces collaborateurs qui connaissent bien l’enseigne.
Ce changement de statut nécessitera une période d’immersion pour se rendre compte de tout ce que fait un patron et pour comprendre le fonctionnement du back office », indique Véronique Discours Buhot, déléguée générale de la fédération française de la franchise.
Sécuriser l’opération avec un avocat
Certaines clauses essentielles doivent figurer dans le contrat de vente, lequel précise ce qui est acheté (parts sociales et/ou fonds de commerce) côté cédant comme repreneur. « Cédant comme cessionnaire doivent prévoir toutes les situations et anticiper toutes les difficultés afin de préserver les intérêts des deux parties.
À titre d’exemple, avant de vendre ses parts sociales, le cédant doit, en amont, veiller à obtenir l’accord de la banque pour la substitution de sa caution personnelle. Il doit en effet obtenir de se dégager de tout risque de voir son patrimoine personnel engagé, une fois les parts de sa société cédées.
Un avocat vous aide à sécuriser l’opération pour ces actes juridiques majeurs et complexes, en considérant le spectre large de la vente, et notamment les impacts sur les contrats – franchise, bail, prêt, caution, les impacts fiscaux et sociaux », rappelle Charlotte Bellet, avocate dans la défense des franchisés et associée dans le cabinet Bourgeon Guillin Bellet & Associés
Des enjeux à concilier
Pour faciliter la transaction, l’humain reste l’élément dominant. « Cédant et repreneur doivent comprendre, mutuellement, leurs enjeux professionnels et personnels. Tous deux vont avant tout réussir à s’entendre s’ils partagent les mêmes valeurs. Souvent, le cédant veut vendre à un repreneur qui lui ressemble.
Il ne faut pas arriver avec des a priori, mais parler en toute modestie et ne poser des questions ou ne donner des avis que s’ils sont modérés. Et garder ses idées pour le développement pour soi !
Alors seulement, on pourra établir un dossier de vente complet et normé, offrant notamment de poursuivre l’activité avec des éléments concrets tels que les contacts liés au commerce – manager de centre-ville -, comment la ville évolue, l’état de la concurrence, ou encore les influenceurs locaux – maire, commissaire de police, etc. », expose Emmanuel Jury, président de Progressium et membre du collège des experts de la fédération française de la franchise.
« Dans une reprise d’entreprise, l’aspect humain est déterminant, car une transmission reste une histoire personnelle. La communication doit bien passer entre les deux parties. Le cédant doit chercher quelqu’un qui va faire mieux que soi, et le repreneur ressentir le plaisir qui accompagne le goût du risque et vouloir bâtir un patrimoine. », confirme Bernard Fraioli, président du CRA (Cédants et Repreneurs d’Affaires).
Vérifications indispensables, communication et collaborateurs à avertir
Durant l’opération de transmission d’entreprise, certains éléments sont plus particulièrement à anticiper ou à vérifier. « Le repreneur doit d’abord choisir s’il reprend seulement le fonds de commerce ou s’il achète les parts sociales de l’entreprise avec une garantie de passif.
Le repreneur doit consulter les dossiers du personnel – congé parental, litiges, etc. -, et pourquoi pas réaliser un sondage de la concurrence, pour savoir ce qu’elle pense de l’entreprise cédée. Le cédant peut prendre de la hauteur de vue sur son patrimoine en consultant un notaire, et préparer sa succession, à travers l’héritage, entre ses enfants.
Les salariés du cédant sont les premiers à devoir être informés de la cession, réglementairement selon la loi Hamon, mais aussi moralement, pour éviter la désagréable surprise de l’apprendre d’une autre manière. Il faut aussi avertir le second cercle : franchiseur, comptable, banquier… Ils peuvent s’avérer facilitateur de l’opération ou apporteurs de solutions.
Le franchiseur a la plupart du temps un droit d’agrément sur l’opération mais il reste une force vive pour faire avancer la réflexion de son franchisé cédant et débloquer une situation en se montrant au besoin juge de paix », note Olga Romulus.
Savoir-faire : l’animation individuelle, pour des transmissions en douceur, en cette période charnière
Si la reprise d’entreprise reste peu anticipée par les enseignes de franchise, elle pourrait entrer dans le cadre du job des animateurs. « Le franchiseur devrait s’appuyer sur les animateurs de réseau pour réaliser une cartographie du parc de magasins, et ainsi anticiper les reprises et les départs.
Cela permettrait d’alerter les têtes de réseau sur d’éventuels candidats à la reprise et d’anticiper la construction de la succession. D’autant qu’en cas d’erreur de casting, un point de vente peut péricliter et abîmer l’image de l’enseigne. Nous sommes dans une période charnière où les transmissions doivent être professionnalisées, pour éviter des déceptions de part et d’autre », confirme Véronique Discours Buhot, déléguée générale de la fédération française de la franchise.
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